Les régions polaires Antarctiques | L'océan Austral

Les poissons vivant du froid

Sur les 20.000 espèces de poissons connues dans le monde, 270 seulement fréquentent les eaux antarctiques. Une des causes de cette pauvreté réside dans le fait que les plateaux continentaux - qui, dans une configuration de profondeur habituelle, sont des zones marines très poissonneuses - descendent plus profonds que la normale, entre 500 et 700 mètres au lieu de 150 à 200 dans les autres parties du monde (cela serait dû au fait que le continent s'est enfoncé et s'enfonce encore toujours sous le poids de la glace) ; les poissons habitués à vivre en eaux peu profondes, qui sont ailleurs très nombreux, sont donc rares dans l'océan Austral. D'un autre côté, on sait qu'il existe quelques espèces abyssales puisque des captures ont été faites jusqu'à 4.500 mètres de profondeur dans la mer de Weddell. Les poissons benthiques (c'est-à-dire vivant sur ou près du fond) qui forment 75% des espèces antarctiques peuvent être divisés en deux groupes ; ceux qui vivent jusqu'à 500 à 700 mètres sur le plateau continental - c'est la majorité - et ceux qui vivent plus bas, sur la pente continentale ou la plaine abyssale.

Leurs caractéristiques principales résident dans l'étonnante adaptation au froid que leur organisme a pu développer au cours des âges. Certaines espèces possèdent ainsi des molécules antigel - une sorte de glycol - qui semblent bloquer toute formation de glace dans les fluides corporels. D'autres ont un métabolisme remarquablement bien adapté au froid. Mais le plus curieux c'est que ce dernier ne ralentit en rien, comme on pourrait le supposer, les fonctions vitales essentielles comme la mobilité ou l'alimentation ; ces poissons nagent, en effet, aussi vite et mangent autant que la majorité des autres poissons de par le monde. Ce qui veut dire que leurs enzymes, elles aussi, ont dû parcourir un sacré chemin pour s'adapter à leurs nouvelles conditions de vie.

Une des familles de poissons les plus connues de l'Antarctique est celle des "poissons des glaces" (les Channichthyidae). Sa notoriété est due au fait qu'elle est le seul groupe de vertébrés au monde à ne pas avoir d'hémoglobine ; on dit de ces poissons qu'ils ont le sang blanc.
Le transport de l'oxygène devant dès lors s'effectuer par d'autres moyens (le plasma entre autres), sa circulation est diminuée d'environ 90% par rapport aux autres espèces vivant dans le même environnement, et ce, malgré que leur coeur soit deux fois plus gros que la normale, qu'il travaille deux fois plus (mais pas deux fois plus vite) et que le volume de son sang soit 3 à 4 fois supérieur à celui de ses congénères.