|
|
Les régions polaires Antarctiques | Les glaces de l'Antarctique | Les calottes glaciaires Les carottes glaciaires Avant d'analyser les informations que la science retire des calottes glaciaires, il faut disposer d'une échelle chronologique fiable qui permette de dater les couches de glaces prélevées. Parmi les méthodes utilisées: la mesure de quantité de radiocarbone subsistante contenue dans l'air emprisonné des bulles de gaz - ces bulles millimétriques bien closes sont de véritables micro-atmosphères scellés comme dans un coffre étanche -, la mesure de la radioactivité du plomb 210 (produit par la désintégration dans l'atmosphère du radon gazeux émanant de la croûte terrestre), l'analyse des fluctuations saisonnières de la composition de glaces (les couches d'été sont moins denses que celles qui se déposent l'hiver) et les repères de dates connus : si un forage rencontre la trace de couches de cendres importantes et qu'on estime que la carotte est en train d'approcher la fin du siècle dernier, on saura que les cendres en question proviennent plus que probablement de l'éruption du volcan Krakatoa en 1883. On a également pu caler dans les particules de glaces les retombées d'éléments radioactifs produits par les essais thermonucléaires de 1954 : de telles traces ont été trouvées au Groenland et dans tout l'Antarctique. Une dernière mesure chronologique est celle de l'horloge isotopique. Pour mieux comprendre ce qui va suivre, rappelons que les atomes sont constitués d'un noyau autour duquel gravitent un nombre x d'électrons ; le noyau atomique, lui-même, est composé du même nombre x de protons portant une charge positive et d'un nombre z de neutrons, eux non chargés. Puisque la glace est avant tout de l'eau et que cette dernière est composée d'atomes d'hydrogène et d'oxygène (qui ne se souvient du fameux H2O?), ce sont vers ces deux éléments que les regards des glaciologues vont se tourner. On a pu montrer que le rapport des isotopes de l'oxygène 18 (O18) et ceux de l'oxygène 16 (O16) dans les précipitations neigeuses qui affectent l'Antarctique est directement fonction de la température ; on dispose donc, grâce à la composition isotopique en oxygène des glaces, d'un remarquable paléothermomètre.
Il serait trop long de faire le chemin qui consiste à calculer l'épaisseur des glaces d'un inlandsis à partir de ces petites bulles de gaz. Il faut savoir néanmoins qu'en raison du fait que la teneur totale en gaz est essentiellement fonction de l'altitude à laquelle la glace s'est formée, les hommes de science ont pu prouver que la configuration du continent glacé s'était considérablement modifiée au cours des âges ; moins 400 mètres en Antarctique oriental le long des côtes et plus 150 mètres environ en Terre Adélie sont des chiffres couramment cités. "L'accroissement du taux d'accumulation durant la déglaciation ne serait pas étranger à l'épaississement de la glace au centre de l'Antarctique depuis la fin du Dernier Glaciaire", écrit encore Roland Souchez. L'amincissement de la glace dans les régions côtières depuis le maximum du Dernier Glaciaire résulterait, lui, de la remontée du niveau marin et de la hausse de la température. Les causes de ce grand réchauffement qui a marqué la fin de Dernier Glaciaire sont encore mal connues. Mais à défaut de conclusions définitives, l'analyse de la composition des gaz présents dans les glaces nous fournit des données essentielles sur les variations de paramètres-clés de notre environnement lors de l'établissement d'une glaciation ou lors d'une déglaciation et, à ce titre, elle éclaire les causes des changements climatiques." (2) Si l'on s'intéresse un instant au seul CO2, les recherches des glaciologues ont mis en évidence un fait important dans l'évolution de notre atmosphère : l'accroissement de la teneur de l'atmosphère en dioxyde de carbone (25 à 30% au cours des deux derniers siècles et 100% d'ici un siècle) n'aurait pas déclenché mais seulement amplifié le grand réchauffement postglaciaire que le monde connaît aujourd'hui. Certes, l'hypothèse demande vérifications. Mais la question est désormais posée : fait-il aujourd'hui plus chaud à cause du CO2 ou le CO2 n'est-il que la résultante du réchauffement global de l'atmosphère ? Les dernières informations auxquelles s'intéresse la glaciologie concernent les molécules de substances diverses contenues dans les bulles et véhiculées par la circulation atmosphérique générale : poussières provenant d'une éruption volcanique ou de déserts, embruns de mer, poussières de météorites, poussières polluantes dégagées par les activités humaines. Imaginons qu'un nuage toxique en provenance du nord se retrouve au-dessus de l'Antarctique et qu'il neige à ce moment-là : les cristaux emporteront à tout jamais dans leur mémoire les traces du passage de ce nuage toxique.
(1)Roland Souchez, Les Glaces Polaires, Editions de l'université de Bruxelles, collection "Comprendre le Progrès", 1988, p129. (2) Roland Souchez, id plus haut, p 131.
|