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La modélisation : afin de mieux comprendre la dynamique de la banquise

Modéliser pour mieux comprendre. Il faut donc mettre tout en oeuvre pour mieux comprendre les secrets des glaces marines australes. Au nombre des méthodes utilisées pour pallier au manque d'observations sur le terrain, la modélisation de la glace.

Les modèles sont des représentations de la réalité.
A partir d'observations et d'études théroriques, on essaye d'isoler les mécanismes régissant le comportement de la glace, mécanismes que l'on formalise par des équations mathématiques.
C'est ce qu'on appelle le modèle.

Cette méthode est pratiquée, entre autres, à l'Institut d'Astronomie et de Géophysique Georges Lemaître de Louvain-la-Neuve au sein de la cellule dirigée par le climatologue belge André Berger. Comme l'explique Hugues Goosse, chercheur et membre de l'équipe, "Les modèles sont des représentations de la réalité. A partir d'observations et d'études théroriques, on essaye d'isoler les mécanismes régissant le comportement de la glace, mécanismes que l'on formalise par des équations mathématiques. C'est ce qu'on appelle le modèle. Ensuite, on résout ces équations grâce aux capacités de calcul des ordinateurs en espérant que les résultats obtenus seront suffisamment proches de la réalité. Si ce n'est pas le cas, on cherche à améliorer le modèle en tenant compte de ce qu'on avait négligé jusque là et en modifiant la représentation de certains processus jusqu'à obtenir un résultat satisfaisant.

" Cette démarche est, en fait, proche de la démarche scientifique classique où l'on fait des expériences en laboratoire qui permettent d'élaborer une théorie, théorie que l'on améliore en fonction des résultats de nouvelles expériences. La simulation par ordinateur fournit en quelque sorte un instrument supplémentaire dans la panoplie du scientifique. Il faut toutefois insister sur le fait que les modèles ne peuvent remplacer les observations. En effet, on a besoin de mesures de terrain pour savoir comment représenter les phénomènes physiques, pour connaître les valeur des paramètres importants comme la rigidité de la glace, le coefficient de frottement entre la glace et l'air, ainsi que pour vérifier les résultats. Une fois que l'on a obtenu un modèle satisfaisant, on peut l'utiliser pour réaliser toutes sortes de simulations sur ordinateur. L'un des buts ultimes de ces expériences est de mieux comprendre le comportement de la glace marine. Les modèles sont des outils fantastiques puisqu'ils permettent d'obtenir la valeur simulée (par exemple la vitesse de la glace) à chaque instant et en un très grand nombre de points. Il est donc possible de réaliser des études plus détaillées qu'au départ des observations sur le terrain qui, en Antarctique, sont relativement rares. On peut aussi réaliser des expériences en modifiant les conditions, émettre des hypothèses et analyser leurs implications. Un exemple ; si l'on veut avoir une idée du rôle de la dérive des glaces sur l'océan, dans un modèle, cela est assez "simple". Il "suffit" de bloquer la glace et de comparer les résultats obtenus avec la glace mobile à ceux obtenus en considérant qu'elle est fixe"

De telles instrumentations scientifiques ne sont pas nécessaires pour décrire le processus de formation des glaces marines. On sait depuis longtemps, en effet, que, gelant à -1,8°C, les eaux salines donnent naissance d'abord à des petits cristaux de glace qui flottent à la surface de la mer -à ce stade, cela s'appelle la glace pelliculaire- en attendant de se voir transformés en plaquettes de glaces et en aiguilles. Lorsque les eaux sont tumultueuses, un mélange poisseux de cristaux de glace se forme sous la surface ; c'est le fraisil (ou frasil). Une image familière des eaux marines qui sont en train de geler est cette vision de cercles aux pourtours relevés ressemblant à des nénuphars. Accolées les unes aux autres, ces crêpes de glaces laissent voir entre elles de fins trajets d'eau de mers à peine gelés. Naturellement, ce patchwork finit par se consolider, au même titre que le fraisil ; si la neige tombe à ce moment-là, elle formera un fin tapis qui s'épaissira au fil du temps et deviendra banquise.

Jusqu'à présent, les satellites, qui depuis le milieu des années 70 observent le continent Antarctique, n'ont pas pu donner de mesures précises de l'épaisseur de la banquise ; les radiomètres micro-ondes ou infrarouges qui l'observent à 36.000 kilomètres d'altitude peuvent déterminer le pourcentage d'eau de mer recouvert par les glaces, rien de plus. Il est toutefois admis que l'épaisseur de la banquise antarctique oscille entre 30 centimètres et plusieurs mètres, sa valeur moyenne étant de 1 mètre -contre 3 mètres dans l'océan Arctique. Elle est le résultat des conditions de sa formation, des mouvements qu'elle accomplit et des déformations inévitables qui s'en suivent.

L'épaisseur de la banquise antarctique oscille entre 30 cm et plusieurs mètres, sa valeur moyenne étant de 1 mètre - contre 3 mètres dans l'océan Arctique.

Des phénomènes comme la stabilité relative des propriétés de la banquise ou la présence de polynies (polynie veut dire "lac" en russe), de vastes étendues d'eaux libres qui trouent, ci et là, les zones de banquise restent, eux aussi, relativement mystérieux. La polynie de la mer de Weddell - un lac de 50.000 km²- a été observée à trois reprises entre 1973 et 1976 mais n'a plus réapparu depuis. Soumise au feu des supputations scientifiques, elle n'a pas encore livré son secret.
Certains font appel à l'apport de chaleur de l'océan ou aux effets thermodynamiques du vent pour expliquer le phénomène ; d'autres émettent l'hypothèse selon laquelle l'océan Antarctique posséderait dans ses entrailles une mémoire sélective qui serait capable de reproduire d'une année sur l'autre - comme mu sur sa propre lancée - un événement d'importance ressemblant à la polynie de la mer de Weddell. Là s'arrêtent les hypothèses.