EXPEDITION DE RECONNAISSANCE DANS LE QUEEN MAUD LAND
Alain Hubert et Daniel Mercier

Ce court séjour a été divisé en deux temps: trois jours passés au pied et dans les parois, et deux jours à se balader, à mieux sentir l'environnement. Et c'est finalement le pic Holtanna qui a été retenu. Il se trouve dans un superbe cirque de montagnes où l'on trouve une dizaine de pics rocheux. Le Holtanna comporte deux sommets: le premier au Nord et l'autre, au Sud. C'est une paroi verticale de plus de 800 mètres de haut, un vertigineux à-pic en quelque sorte, idéal pour tenter de la grimpe extrême. Les deux sommets seront au programme de l'expédition.

Lundi 24 janvier (dernier communiqué de cette expédition)
Beaucoup plus difficile et plus dangereux que prévu...
Maintenant que Hubert et Mercier sont rentrés au pays, antarctica.org dresse un bref bilan de cette expédition de reconnaissance dans le Queen Maud Land.

Autour du voyage d'abord : bien que Hubert et Mercier soient restés plus d'un mois partis, ils n'ont passé, en tout, que 4 jours sur les lieux mêmes de la future expédition Queen Maud Land 2000 qu'il organise en cette fin d'année avec une brochette de grimpeurs internationaux et des idées nouvelles en ce qui concerne sa médiatisation (du 31 décembre 1999 au 4 janvier 2000 - c'est là qu'ils ont rencontré et sympathisé avec l'équipe américaine de Ronald Ross et Sheryl Schindler). On se rappelle que ce furent les conditions météos exécrables qui ont retardé tout le monde là-bas cette saison. On se rappelle aussi, pour l'anecdote, qu'à aller, ils ont mis 7 jours pour effectuer le trajet Patriot - Blue One et que le même trajet a été effectué en 7 heures lors du retour vers la base touristique, le 4 janvier.

L'environnement : le pic choisi pour l'expé de l'an prochain est le pic Holtanna, qui culmine à 2680 mètres et s'élève d'environ 800 mètres au-dessus de la calotte glaciaire, se trouvant, elle, à 1900 mètres. Ci-joint une succincte localisation signalétique, en attendant au mois de mars, les cartes. Comme on le voit sur le document, le pic le plus haut du cirque - qui comprend 12 sommets - est le Ulvetanna (2931 m, chasse gardée des alpinistes Norvégiens) et le Holtanna, lui, se compose deux pics ; l'expédition Queen Maud Land 2000 - désormais baptisée THE WALL - LE MUR - se propose de grimper les deux pics (face Nord du pic Nord et face Sud du pic Sud) du Holtanna . Est-il utile d'ajouter que les paysages de ce cirque sont d'une beauté à couper le souffle...

Un bref bilan technique. Les voies sont plus difficiles que prévu, la roche est plus abrasive ; elle est inégale dans sa résistance et plus fragile que prévu, aussi. Les fissures dans le granit sont larges, ce qui va rendre compliquée la pose des moyens de protection. Rappelons qu'il est hors de question pour l'expédition d'équiper la paroi par où les hommes vont grimper comme le font d'habitude les grimpeurs dans n'importe quelle autre partie du monde, c'est-à dire en posant des spits en quantité - protection de l'environnement antarctique oblige. Le défi ne n'en retrouve donc que plus intéressant.
D'autre part, Les parois du Holtanna sont du vertical pur et les niveaux de grimpe vont jusqu'à 7, voire 7a, pour l'escalade libre et jusqu'à A3 ou A4 pour, l'escalade artificielle (il y a aussi quelques surplombs spectaculaires).

Le repérage en soi.
Daniel Mercier et Alain Hubert ont exploré les parois du Holtanna ; durant ce bref laps de temps passé dans le cirque et sur les parois du Holtanna, Hubert et Mercier ont essayé de trouver un chemin naturel de grimpe en suivant les fissures dans le rocher. Et ils se sont rendus compte qu'ils devront grimper en utilisant la technique du "Pendule" ; c'est-à-dire que, lorsqu'ils arriveront en bout de course dans une fissure, ils devront "penduler" pour en trouver une autre à proximité et continuer la grimpe. Ils ont aussi décider d'emporter tout le matériel avec eux au sommet car ils vont redescendre par l'autre côté.

En tâtant du granit, ils ont également testé du nouveau matériel dont un nouveau modèle de chaussons d'escalade pour grand froid. Pendant le reste du séjour, ils ont eu l'occasion d'essayer de nouvelles voiles, des skis, et, surtout, de mettre la dernière main au modèle de chaussures fabriqué par One Sport (avec des fixations Salomon SNS intégrées). Au début du mois de Mars, nous en dirons plus sur ces chaussures en particulier et sur les nouveaux équipements polaires en général dans la rubrique Eco-Tourisme.

Samedi 8 janvier 2000 : Par la magie du réseau : from Antarctica with love


De gauche à droite : Daniel Mercier, Ronald Ross e t Alain Hubert, posant devant le pic Holtana, Queen Maud Land, décembre 99
© photo : Sheryl Schindler

Hubert n'avait pas eu le temps de nous le dire mais, de Patriot Hills jusque dans les Queen Maud Land, il a voyagé en compagnie d'un groupe de voyageurs américains pas comme les autres. En effet, ayant déjà été au pôle Sud en 1998 et attrapé ce qu'on pourrait appeler le virus de l'Antarctique, ils ont décidé de revenir cette saison sur le 6e continent et de choisir une région des Queen Maud Land appelée "The Jaws of the Wolf" comme terrain d'étude et de voyage.

Il est intéressant de dire un mot au sujet de cette expédition. Ronald Ross a aidé une équipe d'étudiants à l'université Stanford à développer un satellite de taille réduite qui devrait être lancé dans l'espace. Le but de leur voyage est de tester des modules électroniques et des algorithmes télémétriques en installant là-bas, dans le Queen Maud Land, une station météorologique très éloignée. Tout au long de leur expédition, ils rassemblent les informations recueillies de cette station, données qu'ils envoient ensuite via satellite à l'université de Stanford. Parmi les gens impliqués dans ce programme, il faut citer deux des principaux volontaires : Roy Welch (W0SL) et Jerry Smyth (K8SAT) qui se sont chargés non seulement de relayer les messages ainsi que les images en provenance de l'Antarctique via le satellite mais aussi de les faire parvenir à la liste des souscripteurs du newsgroup et de les publier sur le site de l'expédition.

Cela nous a donné l'occasion et le plaisir non seulement de visualiser pour la première fois le Holtana (en fond sur la photo) mais aussi de publier quelques superbes clichés pris par Sheryl Schindler, la compagne de Ronald Ross - mille merci à eux.
Nous rappelons à tout hasard, que, pour cette expédition de reconnaissance dans les Queen Maud Land, Alain n'a pas jugé utile d'emporter avec lui les moyens de transmission habituels qui lui auraient permis de nous envoyer lui-même ce type de document.
Ce voyage lui aura en tout cas été fort nécessaire, c'est du moins ce qu'il nous a déclaré vendredi 7 janvier après-midi lors d'une liaison satellite depuis la base de Patriot Hills où il venait d'arriver. "Naturellement 4 jours dans les Queen Maud alors que nous pensions y rester plus de 15, c'est un peu court", expliquait-il. "Mais cela a été quand même profitable à tous niveaux, et surtout à celui de la technique. Car nous nous sommes rendus compte, Daniel et moi, que ces rochers sont drôlement plus dangereux que prévus ; il sont en effet très abrasifs et fragiles en surface. Il faudra faire gaffe ! D'autre part, on s'est rendu compte que les voies possible dans ces faces, ces à-pic, semblent très difficiles...Cela dit, on a repéré les bonnes voies à faire et c'est en partie pour cela que nous étions venus dans l'Antarctique cette saison..."

Le retour de Hubert et Mercier se situera probablement aux alentours du 15 janvier en Belgique, si la météo antarctique le permet, naturellement.

Mercredi 5 janvier 2000 : Pérégrinations aériennes dans l'Antarctique...
De passage à la station Blue One le 29 décembre dernier, Alain Hubert a pu nous envoyer rapidement quelques nouvelles de son épopée à travers la partie occidentale de l'Antarctique. "A cause de cette météo pourrie - ici, les habitués n'ont jamais vu de telles conditions - j'ai mis exactement sept jours pour me rendre de Patriot Hills à Blue One", a expliqué Hubert en utilisant le téléphone satellite de la base ANI. "D'abord, en nous rendant de Patriot vers Blue One le 24 décembre, nous avons dû rebrousser chemin en route. Et nous diriger vers l'île de Berkner d'où partent en général toutes les expéditions qui prétendent vouloir faire la traversée du continent. Là, nous avons bivouaqué en construisant rapidement quelques igloos de fortune. Autant te dire que la veillée de Noël fut des plus originales ! Après quoi, nous sommes restés bloqués sur place pendant deux jours - vent, white out et neige...
Le 27 au matin, nous avons pu enfin décoller vers Blue One mais, comme le trajet avait été plus long que prévu, nous avons été obligés de refueler. Heureusement les gens de ANI prévoient de tels imprévus et ils ont disposé entre Patriot et Blue One des dépôts de fuel, au cas où... Nous avons donc du effectuer un remplissage du réservoir à deux reprises. Le premier sur la mer de Weddell et l'autre sur le plateau continental, à un endroit qui, en fait, se trouve tout à proximité du lieu prévu pour la construction de la base de recherches scientifiques européenne Epica.
Le voyage pourtant n'était pas fini car, même avec le plein, nous n'avons pas pu atteindre Blue One - toujours à cause du temps - et avons du faire route vers la base sud-africaine de Sanae. Là, nous avons été reçus comme des rois et j'ai pu enfin visiter une base scientifique autre que la ville de McMurdo et la station Amundsen Scott du pôle Sud. C'était très intéressant et, je le répète, les gens, aussi bien les techniciens que les chercheurs, ont été extrêmement sympathiques.
Enfin, le 29 décembre au soir, nous avons pu atteindre Blue One.
Nous venons en fait de débarquer et dans moins d'une heure, on repart vers le pic Oltana. Il était prévu que nous fassions ce trajet avec nos powerkites mais le temps manquant, nous avons demandé au pilote de nous rapprocher des montagnes. Je serai probablement de retour à Patriot Hills aux alentours du 4 ou du 5 janvier, si le temps le permet, naturellement. Mis à part tous ces contretemps, c'est la grande forme... Daniel et moi, on ne songe plus qu'à aller s'éclater dans le granit...
A bientôt et mes meilleurs voeux à tous."

Jeudi 16 décembre 99 : Un temps pourri à Patriot Hills
Temps infect sur cette partie du continent antarctique, nous a dit Alain Hubert qui est arrivé à Patriot Hills il y a quelques jours en compagnie de Daniel Mercier. Pour rappel, les deux hommes effectuent un repérage dans les Queen Maud Land en vue de l'expédition sur le mur de granit de l'an prochain.

Mais les choses ne se présentent pas très bien. Car il règne un temps pourri à Patriot où Alain et Daniel sont bloqués par la neige et le vent - tout comme 25 autres touristes d'ailleurs qui attendent une amélioration de la météo.

"Ils n'ont jamais vu un temps pareil, nous disait Alain au téléphone, jeudi 16 décembre après-midi, la tempête est effroyable, il neige et vente tout le temps. Le vent souffle sans discontinuité à des vitesses avoisinant les 80 et même les 100 km/h ! Pour l'instant, il y a également quelques touristes qui sont bloqués avec un DC3 au pôle Sud, ils ne savent pas quand ils vont revenir...c'est dire si l'ambiance, ici, est plutôt morose..."

Autre information qui peut aussi concerner le déroulement de l'expédition de Dixie ; d'après une expédition américaine qui vient de revenir du Mont Vinson, il est tombé énormément de neige ces dernières semaines sur cette montagne, ce qui a permis aux Américains de faire toute la descente en... snowboard.