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Les régions polaires Antarctiques | Brève histoire de l'Antarctique

Drames, tragédies & exploits (Page 2)



Shackleton le grand...

Sir Ernest Shackleton est un autre héros de légende. Attiré très tôt par la grande aventure polaire, on l'a vu accompagner Scott en 1902 et faire partie de ceux qui se sont le plus approchés du pôle Sud. Une fois rentré dans son pays, Shackleton se met en tête de repartir ; mais cette fois, il dirigera lui-même les opérations. Le but de ce nouveau voyage ; être le premier à atteindre le pôle Sud. Le 7 août 1907, celui que ses camarades surnomment The Boss quitte Torquay à bord du Nimrod, un baleinier aux mâts pourris que l'explorateur a acheté avec peine tant les finances ont été difficiles à trouver ; 15 hommes triés sur le volet l'accompagnent. Tenaillés par la peur de ne pas avoir assez de nourriture et craignant à tout moment de tomber dans une crevasse, Shackleton et trois de ses compagnons vont marcher en tirant leurs traîneaux pendant 128 jours (du 29 octobre 1908 au 5 mars 1909) luttant contre le froid, la faim, la dépression et la neige trop molle qui les empêche souvent d'avancer. Ils échouent, à moitié morts, à 180 kilomètres du but.
Mais c'est l'ultime aventure tentée par Ernest Shackleton dans l'Antarctique qui va le faire rentrer dans le panthéon des grands.

Nous sommes cette fois en 1913. Comme le pôle Sud a déjà été atteint deux fois (voir plus loin), celui que l'on a souvent surnommé le bouledogue anglais doit trouver autre chose pour séduire les partenaires financiers. C'est ainsi qu'il décide de tenter la première traversée intégrale du continent austral. Le projet est à la mesure du personnage : ambitieux, gigantesque, démesuré... Pour ce faire, les hommes vont en effet devoir parcourir une distance de 3.000 kilomètres à pied et loger pendant près de six mois sous tente dans les conditions que l'on sait ! Quelques hommes partiront de la mer de Weddell et passeront par le pôle pour rejoindre, à une latitude convenue, une autre équipe, partie, elle de la mer de Ross. Lorsque le 4 août 1914, veille des adieux, Shackleton apprend que l'ordre de mobilisation générale est donné, il annonce à l'amirauté britannique que ses bateaux, ses hommes et tout son matériel sont à la disposition du pays. "Pas question, répond en substance le télégramme envoyé par Winston Churchill, les sociétés scientifiques et géographiques qui soutiennent l'expédition souhaitent vous voir partir".
Le bateau Endurance mérite qu'on s'y arrête un instant ; ce bâtiment n'est autre, en effet, qu'un yacht polaire, le Polaris, dont les plans avaient été imaginés et conçus par Adrien de Gerlache pour effectuer des croisières dans les eaux du Grand Nord mais qui, vu la vogue des expéditions antarctiques, avait été convoité par les explorateurs avant même que les premiers touristes fortunés ne montent à bord. C'est ainsi que Shackleton, qui avait la plus haute considération pour son ami Adrien de Gerlache, décida d'acheter le bateau et lui demanda de l'aménager pour son expédition. Convoyé de Norvège jusqu'aux docks de Londres par Gerlache, l'Endurance quitte Plymouth le 8 août. Deux mois plus tard, l'équipe de soutien rejoindra Hobart en Tasmanie pour embarquer à bord de l'Aurora et faire voile vers la mer de Ross.
Partis pour réaliser le plus grand raid jamais entrepris jusqu'ici dans l'Antarctique, les hommes de Shackleton ne poseront pas le pied sur le continent. Le 20 janvier, après s'être frayé péniblement un chemin à travers le pack de la mer de Weddell, l'Endurance est bloqué dans les glaces à 76° de latitude sud.
Il faut donc se préparer à un long hivernage. Il est hors de question, en effet, de se diriger vers le sud car personne ne sait exactement à quelle distance du navire se trouve le continent ; ils sont également trop loin de l'île Paulet, la première terre connue située à plus de 300 miles à l'ouest qui pourrait leur offrir nourriture et abri. Au sortir de l'hiver, les hommes de Shackleton pensent que le calvaire prend fin et, lorsque les premières glaces se brisent, ils tentent, des semaines durant, de désenclaver le trois-mâts. Sans succès. Shackleton prend alors la décision d'abandonner l'Endurance qui se fait de plus en plus maltraiter par les glaces. Le 21 novembre, alors que le trois-mâts a déjà une partie de sa coque enfouie sous la banquise, la dernière partie visible du navire sombre dans la mer de Weddell. Comme l'agonie a duré plus d'un mois, l'équipage a eu tout le temps de débarquer le matériel nécessaire pour survivre sur un bout de banquise - un glaçon flottant, comme l'appelle l'explorateur dans son livre "L'Odyssée de l'Endurance, première tentative de traversée de l'Antarctique". Seule solution raisonnable : rejoindre coûte que coûte l'île la plus proche. Pendant trois mois, Shackleton et ses hommes vont flotter sur un océan gelé et haler trois canots au travers d'une neige épaisse et molle, devant parfois sauter d'un morceau de banquise sur un autre morceau de banquise.

Au cours de ces 100 jours, Shackleton et ses hommes vivent un véritable enfer. Avec l'épopée de Scott, ces mois passés sur la banquise à rejoindre la terre ferme sont considérés comme les pages les plus héroïques de la conquête polaire. La faim est telle que, si le cuisinier a le malheur de laisser traîner quelques morceaux de pemmican, les hommes se précipitent pour les ramasser. Une nuit, une fissure s'élargit brusquement sous une des tentes de l'expédition et Shackleton est obligé de secourir un homme qui, resté dans son sac de couchage et n'ayant rien senti, était en train de flotter entre deux "glaçons" !
Le 10 avril, voyant que des chenaux d'eaux libres s'ouvrent autour d'eux, ils n'ont d'autre choix que d'embarquer hommes et matériel dans les canots et de se diriger vers l'ouest. Pour apaiser leur soif qui, au fil des jours devient insupportable, les rescapés sucent du sang de phoque. Le 15 avril, l'île Eléphant au nord de la péninsule Antarctique est en vue ! Pour des marins qui n'ont pas mis pied à terre depuis 16 mois, le débarquement sur ce bout de terre vierge est euphorique. Ils savent pourtant que l'île est déserte et que, pour s'en sortir, il faudra, soit attendre sur place les secours, soit rembarquer à bord des trois canots et naviguer tant bien que mal vers la Géorgie du Sud, distante, elle, de 1.480 kilomètres ! S'ils restent sur l'île, ils mourront tous.

Pour mieux imaginer ce que représente cette aventure, il faut savoir que le jour où Shackleton et six de ses meilleurs hommes embarquent sur le canot James Caird avec un mois de vivres à bord (le 24 avril 1916), ils vont devoir naviguer sur une coque de noix (le canot fait à peine six mètres de long) dans une des mers les plus terribles au monde, être ballottés par des vagues gigantesques et supporter des températures de -20 à -30°! Il n'empêche ; les talents de navigation d'un certain Worsley font merveille et les voiles - même gelées - font avancer l'embarcation de plus de 60 miles par jour, malgré les vents terribles et des vagues énormes qui, à chaque fois, donnent des sueurs froides à l'équipage. "Un autre de nos maux, écrit Shackleton, venait du frottement des vêtements humides sur nos jambes. L'intérieur de nos cuisses n'était qu'une plaie vive ; et un tube de vaseline trouvé dans la boîte à pharmacie n'allait pas loin dans le soulagement de nos douleurs, accrues par la morsure de l'eau salée. Quand il arrivait de nous assoupir, une nouvelle douleur où un nouvel effort à faire nous rappelait rapidement à la réalité. Mon propre lot s'aggravait d'une crise de sciatique bien développée, qui avait commencé sur la banquise plusieurs mois auparavant..."
Mais, tout comme il était écrit que les hommes de Nordenskjöld devaient s'en tirer, l'équipe de Shackleton, elle aussi, eut la vie sauve. Le 9 mai, quinze jours après avoir quitté l'île Eléphant, alors qu'à bord du James Caird les provisions touchent à leurs fins, la Géorgie du Sud est enfin en vue !
Il faudra cependant encore bien du courage à Shackleton et à deux de ses compagnons pour parcourir les 30 kilomètres de montagnes gelées et de glaciers qui séparent la plage où ils ont débarqués en catastrophe de Stromness, la seule station baleinière installée sur l'île. A mi-parcours, Shackleton pense même que tout est perdu lorsque, bloqués par une chute d'eau entourée de falaises de glaces infranchissables, ils sont obligés de la traverser sous l'eau glacée. Pas étonnant que les garçons de la station qui, les premiers, voient arriver sur le quai les trois rescapés s'enfuient à toutes jambes, pensant que l'île est habitée par des monstres! Une des premières questions posées par Shackleton à l'administrateur de la station concerne la guerre. "La guerre n'est pas finie, leur répond-il. Il y a des millions de tués. L'Europe est folle. Le monde est fou".
Le soir-même, un bateau quitte le quai pour aller chercher les trois hommes restés sur la plage de l'autre côté de l'île et, le jour suivant, un baleinier quitte Stromness avec Shackleton et les siens pour délivrer les hommes de l'Endurance restés, eux, calfeutrés sous leurs canots, sur l'île Eléphant ; comble de malheur, à cause d'un pack trop serré et d'une bourse trop maigre, ils devront s'y reprendre à quatre fois, faire appel à la générosité des Argentins et changer quatre fois de bateau pour arriver enfin, le 30 août, en vue du campement. Là, c'est le miracle ; bien qu'affaiblis, hirsutes, psychologiquement atteints, malades et forcément amaigris, les 22 hommes sont tous sains et saufs ! Sur les 5.000 candidats qui s'étaient présentés à l'enrôlement dans l'expédition, Shackleton avait bien choisi les meilleurs...


14 décembre 1911 & 17 janvier 1912 : Le drame plus fort que la victoire...

Qui sera le premier au pôle Sud : Amundsen ou Scott ? Cette question, personne alors ne se la pose. Car, lorsque le Norvégien quitte le port d'Oslo à bord du Fram (le bateau utilisé par l'explorateur Fridtjof Nansen, lors de sa dérive sur la banquise arctique en 1893), personne ne sait encore - pas même l'équipage - qu'au lieu d'aller comme prévu vers le Groenland et la Sibérie, il se dirige, en fait vers l'Antarctique avec la ferme intention d'être le premier homme à arriver au pôle Sud. Ce n'est que plusieurs semaines après avoir quitté l'escale de Madère, le 9 septembre 1910, que son frère, à qui il a confié son courrier secret, peut enfin envoyer la missive à Londres et faire connaître au monde la grande nouvelle. C'est avec stupéfaction que Scott prend connaissance du télégramme alors que son bateau, la Terra Nova fait escale à Melbourne : "We kindly inform you that the Fram is going to Antarctic. Amundsen".

Suivre sur la carte les progressions
comparées d'Amundsen et de Scott

(en anglais uniquement)

La déception est d'autant plus vive que, quelques mois après avoir établi leur base au Cap Evans (mer de Ross), une de leurs équipes de pointes, qui est en mission exploratoire dans les terres du roi Edouard VII, aperçoit, de loin, le Fram ancré dans la baie des Baleines ! Non seulement Amundsen tente le pôle en même temps que lui mais il choisit, lui aussi, la plate-forme glaciaire de Ross comme point d'attache pour établir son camp de base. Et, comble de malchance, son rival possède déjà quelques jours d'avance, son camp se trouvant, par hasard, environ 100 kilomètres plus au sud que la base du cap Evans !
Pour les deux équipes, les quatre mois de l'hiver 1911 vont être consacrés à préparer minutieusement le grand départ. Chez Amundsen, on s'évertue par tous les moyens à faire une chasse effrénée au poids superflu : le menuisier de l'expédition rabote au maximum les éléments des traîneaux et fabrique des skis. Dans un abri de fortune situé à l'extérieur de la petite maison, on transforme aussi les tentes afin de les rendre plus légères. Du côté de chez Scott, c'est également un foisonnement de tâches en tous genres qui occupe les Anglais pendant les mois d'hiver -préparations minutieuses des portions de vivres, vérification des coutures de tentes, fabrication des semelles en peu de phoque, entre autres.
Il existe cependant une différence essentielle entre les manières dont les deux expéditions se préparent. Chez Scott, on ne fait guère trop attention au poids. Amundsen, par contre, partira le plus léger possible ; chaque homme guidera un traîneau qui sera tiré par des chiens. Scott, lui, utilisera un matériel lourd avec des traîneaux motorisés et des poneys tirant d'autres traîneaux sur une partie du trajet jusqu'à ce que l'équipe d'assaut s'en aille seule. Amundsen a emporté avec lui 86 chiens (dont 13 iront jusqu'au pôle et en reviendront, les autres ayant été abattus au fur et à mesure pour nourrir les survivants) ; Scott, lui, en a embarqué 233. Un autre point de vue sépare les deux explorateurs : l'un compte sur la capacité de ses bêtes pour l'aider à vaincre le pôle, l'autre, en bon britannique qu'il est, préfère miser sur le courage de l'homme. La preuve, c'est qu'au lieu de prendre des chiens dans l'assaut final (qui va se faire sur plus de 900 kilomètres), Scott et ses quatre derniers compagnons décident de tirer eux-mêmes leurs traîneaux sur la glace. On peut bien entendu s'étonner a posteriori de ce choix tactique ; mais l'Angleterre est en pleine crise d'identité et les hommes qui s'en vont défier le pôle Sud doivent être des modèles pour leur concitoyens et ne peuvent pas se permettre d'oublier les grands principes moraux victoriens qui guident les Britanniques : loyauté, courage, esprit de solidarité, sacrifice, abnégation, endurance à la souffrance, etc... Quoiqu'il en soit, en septembre 1911, les deux hommes sont à pied d'oeuvre, à quelques centaines de kilomètres l'un de l'autre. Fin prêts.

Pourquoi Amundsen
est arrivé au pôle Sud avant Scott


Après avoir organisé moult votes à bulletin secret pour décider du jour du grand départ, Amundsen quitte enfin sa base de la baie des Baleines le 8 septembre avec comme seul but de rejoindre le pôle. Trois jours plus tard, en raison d'un froid intense et d'un épais brouillard, il rebrousse chemin alors qu'ils avaient déjà atteint le premier dépôt de vivres. A ce moment, l'explorateur norvégien décide d'alléger encore le raid et de ne plus partir qu'avec 4 hommes, les deux autres ayant comme mission d'aller explorer les terres Edouard VII. Cette fois, les conditions météorologiques sont moins catastrophiques ; le 20 octobre, quatre traîneaux tirés chacun par 13 huskies font route vers le Grand Sud. Devant eux, s'étendent à vol d'oiseau 1.500 kilomètres d'inconnu qu'ils ont décidé de baliser de cairns de neige tous les 100 kilomètres, pour mieux reconnaître l'itinéraire au retour. Deux semaines plus tard, ils atteignent sans encombre le dernier dépôt de vivres et s'y reposent 48 heures. Le raid est léger et les hommes progressent de parfois plus de 50 kilomètres par jour ! Arrivés au pied de la chaîne de montagne qui divise l'Antarctique en deux, ils n'ont plus que 600 kilomètres à parcourir. La traversée du glacier Axel Heiberg qui grimpe vers le plateau continental à plus de 3.000 mètres d'altitude est avalée en moins d'une semaine. Au sommet, ils abattent les chiens qui ne sont plus nécessaires et la marche reprend, malgré les températures qui baissent de jour en jour et le blizzard qui a recommencé à souffler. Le 8 décembre, ils dépassent le record austral établi par Shackleton en 1909 (88°23' sud) et ne se trouvent plus alors qu'à 180 kilomètres du but. Six jours plus tard, c'est la victoire. Les mains gelées, le corps meurtris mais transcendés par l'exploit, ils dressent une tente à l'intérieur de laquelle Amundsen laisse un message pour Scott et ses hommes.

Le 7 mars 1912, après un mois de traversée presque sans histoire, le Fram arrive en Tasmanie ; l'explorateur envoie alors un câble à son frère lui demandant de faire connaître au monde entier la grande nouvelle ; les Norvégiens ont battu les Anglais en arrivant les premiers au pôle Sud !
Au même moment - mars 1912 -, le pire n'est pas encore arrivé aux hommes de Scott. Mais l'expédition tourne mal depuis plusieurs semaines déjà. Elle n'a, en fait, été qu'une cascade de revers malheureux.
Il y a eu d'abord le choix tactique dont il a été question plus haut. Dès le début, Scott a opté pour un raid lourd. Lorsqu'il quitte le cap Evans le 1er novembre 1911, c'est une caravane de plus de 50 kilomètres qui s'ébranle sur la glace ; les traîneaux pèsent 300 kilos chacun. De plus, ils sont tirés par des poneys qui s'enfoncent dans la neige jusqu'au ventre. Comme ils retardent l'expédition, on décide de les abattre au fur et à mesure de la progression. Vinrent ensuite les revers techniques ; le système de refroidissement par air des traîneaux automobiles ne fonctionne pas convenablement : il provoque de nombreuses pannes et d'inévitables retards. Les conditions atmosphériques, elles, non plus, ne sont pas favorables aux explorateurs anglais ; pendant 4 jours, une tempête effroyable souffle sur l'expédition rendant toute progression impossible, après quoi une courte période de réchauffement rend le sol mou et presque impraticable. Les 19 premiers jours, la caravane n'a effectué que 291 kilomètres, soit une moyenne d'environ 15 kilomètres par jour.

Avant de s'attaquer au glacier qui donne accès au plateau, Scott décide de renvoyer les chiens à la base, faisant par là preuve d'un aveuglement obstiné dont les conséquences vont être fatales. Le 3 janvier 1912, 65 jours après le départ, alors que les hommes doivent tirer eux-mêmes les traîneaux, la troupe se trouve encore à 273 kilomètres du but - Amundsen, lui, a mis 51 jours pour effectuer la même distance ! Scott prend alors la décision de renvoyer trois hommes à la base. Ils ne sont donc plus que cinq à lancer l'assaut final au pôle : Robert Falcon Scott, Birdie Bowers, Titus Oates, Edgard Evans et Bill Wilson. Malgré les infortunes diverses, les cinq hommes sont contents d'être enfin seuls à en découdre avec le danger. Mais, un coup de massue va venir freiner la nouvelle ardeur des explorateurs : quelques jours après avoir atteint le sommet de la chaîne de montagne, ils aperçoivent les traces des traîneaux d'Amundsen. Même si cela ne prouve pas que le Norvégien ait atteint le pôle, la découverte est lourde à digérer. Abandonner si près du but ? Les hommes n'y pensent pas. Mais quelle n'est pas la déception des Anglais de découvrir, le 17 janvier, après 78 jours de progression sur un terrain plus que difficile, que l'Union Jack ne sera pas le premier drapeau à flotter au pôle Sud. Dans cette saga qui aura duré plus de dix ans, Scott est arrivé avec 44 jours de retard sur son rival norvégien...
A l'intérieur de la tente, le chef d'expédition découvre, outre la lettre que lui a écrite Amundsen ainsi qu'un pli adressée au roi de Norvège, quelques vêtements de rechange et un sextant. Deux jours plus tard, ce sont cinq hommes dépités qui entament le voyage de retour. Plus de 1500 kilomètres d'inhumaines souffrances avec en tête l'insoutenable pensée que l'échec sera - quel que soit l'accueil reçu en Angleterre - à tout jamais plus fort que la victoire. Une autre course contre la montre s'engage. Le cauchemar commence; il s'agira d'une lente agonie...
C'est d'abord Edgard Evans qui est victime du scorbut et souffre d'engelures. Lorsqu'ils atteignent le premier dépôt, c'est au tour de Titus Oates de voir ses pieds noircis par la gangrène. Le 17 février, Evans meurt dans son sommeil ; un mois plus tard, Oates sort de la tente comme un zombie : malgré le blizzard qui souffle, il dit à ses camarades qu'il s'en va faire un petit tour dehors. Ils ne le reverront jamais plus. Le 17 mars, Scott et les deux autres rescapés approchent du dernier dépôt de vivres ; plus qu'une petite vingtaine de kilomètres à parcourir. Mais une tempête se lève qui les empêche d'avancer ; une nouvelle fois, les hommes sont bloqués. Le lendemain, ils sont à court de combustible. Ils n'ont pratiquement plus de vivres non plus ; le trio se prépare à l'inévitable.
Peut-être ont-ils en tête, qu'au-delà de l'exploit, qu'au-delà de l'échec, il est préférable de terminer sa vie par un acte héroïque dont pourront être fières les générations futures. Scott, Wilson et Bowers dressent une dernière fois la tente qui sera leur linceul ; ils savent pourtant qu'ils ne sont plus qu'à 180 kilomètres du cap Evans !
Huit mois plus tard, un détachement partis des quartiers d'hiver à la recherche des disparus permettra de reconstituer les derniers moments vécus par ces hommes ; comme Wilson et Bowers reposent tranquillement dans leurs sacs et que le chef est étendu sur le sien, l'histoire en a déduit que Scott est mort en dernier et, qu'avant de s'en aller à son tour, il a eu le temps et la délicatesse de s'occuper de ses camarades sans avoir la force de réintégrer ce qui aurait pu le protéger du froid quelques instants encore.

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