COMPAQ POLE II / THE ULTIMATE ARCTIC CROSSING
Alain Hubert & Dixie Dansercoer

Samedi 27 et dimanche 28 avril (day 62 & 63) :

Dernier scénario en date (dimanche 11 am) :
Les modalités de la récupération des deux hommes ont une fois de plus changé depuis hier.
Un hélicoptère MI 8 partira demain vers midi avec un cameraman à bord pour Tchelyouschkine (3 heures de vol) puis volera environ 300 km (2 heures de vol) pour aller faire le dépôt de fuel où restera standby le cameraman. Retour du MI 8 vers Tchelyouschkine.
Pendant ce temps, un Antonov 2 descend aujourd'hui soir de la base de Barnéo pour se poser à Stredny et attendre que le MI 8 ait effectué le dépôt. Il s'envolera donc demain vers 3 pm de Stredny pour faire les 850-900 km environ qui le sépare du camp de Compaq Pole II (entre 4 à 6 heures de vol). A ce propos, Dixie et Alain ont trouvé une excellente piste qu'ils baliseront demain pour faciliter l'atterrissage du monomoteur. Atterrissage prévu vers 9 pm (heure de l'expédition, soit 2pm à Bruxelles). Peut-être plus tôt.
Au retour, l'Antonov 2 refuelera au dépôt et reprendra bien entendu en même temps le cameraman. Le retour de l'équipe est prévue pour mardi vers 3 am à Khatanga (lundi 9 pm, heure de Bruxelles). Le team devrait être de retour à Bruxelles le 2 mai à 1pm.

De nouveaux changements (samedi 4 pm) :
Aux dernières nouvelles, ce ne serait plus les hélicos qui voleraient vers le camp de l'expédition mais bien l'Antonov 2 (au diable donc les problèmes avec le dégivrage des vitres du cokcpit comme annoncé jeudi 25). Les pilotes craignent que l'autonomie du MI 8 (1200 km) ne soit pas suffisante. Même avec le dépôt semble-t-il.
Avec ce dépôt fait à 300 km de Tchelyouschkine, cela ferait en effet 1146 km de vol sans refueler : les hommes se trouvant aujourd'hui à 723 km de Tchelyouschkine, il faut compter l'aller vers l'expédition (723 km ) + le retour vers le dépôt (723 km - 300 km = 423 km), cela donne 1146 km, ce qui, selon les pilotes russes, est un peu juste pour les 1200 km dautonomie de vol du MI 8.
Le pick up est prévu pour lundi - jusquà nouvel ordre bien entendu. D'autres informations plus tard dans la journée sans doute ou, de toutes façons, demain.

Vexation universelle... (samedi 2pm)
Alors que l'on attend la confirmation du pick up pour demain dimanche en fin de journée (leur heure, mi-journée à Bruxelles), on peut quand même se dire que les deux Belges auront décidément tout connu pendant cette aventure.
Jugez plutôt : depuis que la décision a été prise d'abandonner l'idée de rejoindre le pôle et donc de se replier, l'expédition n'aura jamais progressé aussi vite. Les derniers quatre jours, en effet, Alain et Dixie auront parcoucru la bagatelle de 89 km vers le nord-ouest, cela en restant "en attente" deux jours sous la tente ! Soit plus de 22 km de moyenne journalière. Un bon vent et une forte dérive dans la bonne direction, une température plus clémente (-18° C aujourd'hui) - ce qui ne fait pas avancer le tandem plus vite mais fait du bien au moral -, du beau temps... Bref, des conditions qu'ils n'ont pas connu au cours des 58 premiers jours de l'expédition. C'est un comble tout de même...

Vendredi 26 avril (day 61) : Ce serait pour dimanche...

Aux dernières nouvelles en provenance de Khatanga via Cerpolex/Paris, il semble que l'on s'achemine vers un vol avec un seul hélicoptère (MI 8) depuis Khatanga, les deux autres hélicioptères civils disponibles étant encore à la base de Barnéo, bloqués par le mauvais temps.
Le vol partirait de Khatanga dimanche matin, et aurait besoin de dix à douze heures de vol pour accomplir l'opération. Et ce, selon le schéma indiqué sur notre carte du retour, c'est-à-dire avec un dépôt de fuel effectué à une heure ou deux de Tchelyouschkine.

Dans ce cas, Dixie Dansercoer et Alain Hubert seraient problablement de retour en Belgique soit mardi, soit jeudi ou vendredi. Nous tiendrons bien entendu nos visiteurs informés tout au long du week end.

Mardi 23 avril (day 58) : Les explorateurs attendent...

Beaucoup de tergiversations - on s'en doute - en ce qui concerne la façon dont le team va être repris sur la glace.
D'après les dernières informartions reçues, il semble que l'opération depuis Stredny-Arktichewski soit trop risquée - trop d'eaux libres et pour le parachutage du fuel et pour l'atterrisage d'un Antonov 2.
Il faut donc trouver une autre solution. C'est pourquoi les responsables de Cerpolex sont à l'heure actuelle en train de discuter à Khatanga avec les pilotes russes au sujet d'un vol éventuel, en hélicopère cette fois, entre Tiksi et le lieu où se trouve l'expédition. Aux dernières nouvelles, aucune décision n'a encore été prise. Et cela, d'autant plus que Alain et Dixie viennent de trouver aujourd'hui une gigantesque plaque de glace, suffisamment longue et épaisse pour permetter à un Antonov 2 d'atterrir ; c'est une nouvelle donne qu'il faut désormais prendre en compte dans la décision future.

A partir d'aujourd'hui, les hommes ont en tout cas décidé de rester sur place et d'attendre le suite des événements. Il fait -18° C mais la température reste froide à cause d'un vent sud-est d'une trentaine de km/h.

Dimache 21 & lundi 22 avril (days 56 & 57) : 14 km parcourus mais toujours pas de glaces assez solides en vue pour un atterrissage...

Alain et Dixie sont naturellement fort déçus de la tournure qu'ont pris les événements depuis jeudi dernier mais ils savent qu'ils ont tout donné pour mener à bien leur aventure. Et qu'ils continuent à tout donner ; tenter en l'occurrence d'abattre un maximum de kilomètres puisque telle a été la mission que le QG leur a donnée afin qu'ils se rapprochent au maximum du Cap Arktichewski. La preuve : 14 kilomètres de parcourus aujourd'hui au milieu de glaces toujours aussi jeunes et difficiles.
Certes, ils ont bien pu localiser aujourd'hui quelques terrains qui pourraient accueillir l'atterrissage d'un Antonov 2 mais, l'épaisseur de la glace n'était que d'une trentaine de centimètres.

Depuis trois jours maintenant, Alain et Dixie ont changé de cap, contraints et forcés par l'annonce de la nouvelle qu'aucune récupération au pôle Nord ne serait possible après au-delà du 20 mai environ. Ils font du donc du nord-ouest et se dirigent vers le cap Arktichewski et l'île de Stredny d'où partira l'Antonov 2 qui ira les rechercher sur la glace.

Quelles sont les inconnues et les risques de cette récupération ?

1/ Le monomoteur russe Antonov 2 n'a qu'une autonomie de 1200 km, lorsqu'on le charge à plein (de fûts de fuel) et que le poids supplémentaire à charger n'est pas trop important. En ce qui concerne ce dernier point, pas de problème : les traîneaux ne pèsent plus qu'une centaine de kilos et les deux hommes on beaucoup maigri - surtout Alain.
Mais il sont trop loin du cap Arktichewski ; en effet, les hommes s'en trouvent encore aujourd'hui éloignés de820 km. Et ils ne peuvent manifestement pas faire le kilométrage suffisant qui éviterait de devoir faire un dépôt de fuel - cela étant donné les conditions de terrain rencontrées ces derniers jours (c'est pire que jamais, disent-ils). Il faudra donc faire un dépôt quelque part entre le lieu d'envol et l'endroit où sera localisée ce jour-là l'expédition. Ce dépôt de fuel devra être fait non pas sur de la terre ferme (ce qui serait la meilleure solution) mais sur une banquise qui, on l'a vu, est plus qu'imprévisible cette année.
2/ L'Antonov 2 a impérativement besoin d'un terrain de glace de 300 m de long pour pouvoir poser ses skis ; la surface d'atterrissage doit être naturellement la plus plate possible et l'épaisseur de la glace doit avoir au moins de 60 cm. Or, depuis qu'ils ont changé de cap, Alain et Dixie observent que la glace qu'ils foulent devient aussi plus mince - ce soir, ils campent sur une glace jeune de 30 cm d'épaisseur. Pas suffisant pour un éventuel atterrissage.
3/ Depuis qu'ils ont quitté le cap Anisiy, le 25 février dernier, ils n'ont pas encore rencontré un seul terrain qui serait idoine pour l'atterrissage de l'Antonov 2 ; il faut espérer qu'ils en trouvent naturellement un bien vite.
On sait bien sûr qu'il s'agit-là des conditions optimales pour un pick up ; mais tous les spécialistes savent aussi que les aviateurs Russes qui fréquentent la banquise Arctique sont de sacrés pilotes et qu'en cas d'urgence, il sont capables de véritables prouesses.
4/ Quand tout cela va-t-il se dérouler ? Dès que Cerpolex aura les appareils disponibles. Car pour toute opération de ce genre, il faut la présence à terre (ici, sur l'île de Stredny en l'occurrence) d'un hélicoptère MI 8 qui, stand-by, assure le soutien et les secours éventuels.
Durant les premiers jours de cette semaine, Cerpolex est encore occupé avec une grande opération de la National Science Foundation (NSF) qui est en train de récupérer des sondes posées sur les fonds marins à plus de 4000 m de profondeur (voir ici ce programme). Ce n'est donc qu'à partir de mercredi ou de jeudi que les hommes de Compaq Pole II pourront être récupérés.

Depuis deux jours, les hommes tournent quasiment en rond avec une dérive qui fait la folle, les poussant une fois vers l'est une fois vers l'ouest, le mercure est à nouveau descendu jusqu'à -30° C, le temps est au grand beau mais, naturellement le cœur n'y est plus... Ils n'ont toujours pas trouvé de terrain d'atterrissage...

Vendredi 19 avril (day 54) : Ils continuent à marcher tandis que le QG prépare l'opération "Récupération"...

Etant donné le travail que nous avons avec l'opération de récupération d'Alain et de Dixie, nous ne sommes pas à même de livrer une analyse complète de la situation aujourd'hui ; nous l'écrirons ce week end. 

Juste quelques infos donc sur la vacation satellite (Iridium) du jour ; en pleine forme physique et gardant malgré l'abandon un bon moral, les deux hommes continuent de marcher envers et contre tout (ils savent qu'ils doivent se rapprocher au maximum du cap Arktichewski) dans une atmosphère d'un autre monde (banquise plus chaotique que jamais, blocs de glaces gigantesques, hauts comme des cathédrales, etc.) et, donc de se rapprocher de ce lieu d'où devrait partir l'Antonov 2 qui ira les reprendre la semaine prochaine, si tout va bien...

Mercredi 17 avril (day 52) : deux mauvaises nouvelles.

Commençons par la première: Alain et Dixie n'ont pas bougé de la tente aujourd'hui. Jour blanc (white out), visibilité nulle et vent du sud-ouest soufflant toute la journée entre 35 et 50 km/h. Bilan : 20 km de dérive vers l'est poussant l'expédition du même coup quelques kilomètres vers le sud. Hier, ils se trouvaient à 1164 km du pôle, ce soir, le compteur GPS marque 1172 km... Rien de très réjouissant.

Maintenant la seconde : La compagnie canadienne First Air (qui s'occupe d'aller rechercher au pôle Nord les aventuriers explorateurs qui arrêtent là leur route) vient de confirmer une information dont on soupçonnait l'annonce depuis quelques semaines déjà : cette année-ci, contrairement aux autres années, ses Twin Otter basés à Resolute Bay ne pourront aller chercher les aventuriers au pôle Nord après la mi-mai alors que, d'habitude, le pick up se fait jusqu'au début du mois de juin (parfois jusqu'à la mi-juin). Pourquoi ? Parce que, dixit First Air Canada, ce printemps, les choses sont différentes. D'une part, la météo est particulièrement pourrie (- 44° C dans les environs de Ward Hunt en avril comme vécu ces derniers jours par les expéditions qui ont choisi cette route, cela ne s'est jamais vu) ; de l'autre, l'hiver précédent a été particulièrement chaud, ce qui a eu pour conséquence directe de disloquer et de lézarder la banquise Arctique comme elle ne l'a jamais été auparavant. Les atterrissages au de-là de la mi-mai risquent d'être beaucoup trop dangereux ; pas de récupération des expéditions au-delà de cette période donc.

Cette annonce est une mauvaise nouvelle pour toutes les expéditions qui tentent de joindre le pôle nord en général et pour Compaq Pole II en particulier.
Pour ceux qui tentent le trajet du côté de Ward Hunt, on voit mal comment ils pourront accomplir les quelques 5 ou 600 km restants alors qu'ils progressent à la moyenne de 3 ou 4 km par jour et qu'ils n'ont plus que 30 jours pour joindre le pôle. Il faudrait passer à la moyenne d'au moins 20 km/jour pour réussir. Le Singapourien Khoo Swee Chiow (voir notre rubrique " Autres expéditions / En direct ") avance vite mais il est léger et se fait ravitailler plusieurs fois. Les autres expéditions comme les trois Britanniques ou le couple Sjogren, par exemple, ont, elles, choisi l'autonomie et atteindre la moyenne de 20 km/jour avec le poids qu'ils traînent et le terrain qu'ils rencontrent, cela relève de l'utopie. Une occasion de se rendre compte plus concrètement de la différence existante au niveau des efforts consentis entre les expéditions qui progressent en autonomie et celles qui se font ravitailler en cours de route.
Pour Compaq Pole II, la situation est encore plus préoccupante. Car les hommes doivent désormais reconsidérer une fois de plus la fin de leur aventure. Suite à l'abandon il y a quelques jours de l'idée d'accomplir la traversée, ils avaient défini un nouvel objectif, se rabattant sur le pôle qu'ils estimaient pouvoir atteindre début juin. Ce qui aurait été possible si les conditions de terrain se seraient améliorées et, ces derniers jours, elles allaient effectivement en s'améliorant.
Mais le couperet de First Air est tombé et c'est une nouvelle stratégie qu'il va falloir maintenant adopter. Mis au courant hier par le QG, Hubert et Dansercoer se sont donnés le temps de la réflexion - après tout, ne sommes-nous pas dans un monde où rien ne presse ?
Peut-être mais les éléments d'analyse que doivent prendre en compte nos deux polaires resteront incontournables. Un : il est impossible pour eux (ou pratiquement impossible) d'atteindre le pôle Nord avant le 15-20 mai. Deux : les hommes n'ont plus que 47 jours de nourriture dans leurs bagages. Trois : comme First Air ne va pas récupérer des gens au-delà du pôle Nord, ce sera au TO français Cerpolex d'assurer la récupération de l'expédition. Quatre : Dixie et Alain veulent continuer à faire du Nord pour aller le plus loin possible, on les voit mal en effet faire demi-tour vers le cap Anisiy avec, dans le nez, une dérive qui les pousse dans une direction opposée à celle qu'ils doivent suivre. Cinq : Cerpolex, justement, qui installe chaque année la base touristique de Barnéo à proximité du pôle Nord (voir notre suivi de vendredi dernier) ferme cette dernière habituellement dans les premiers jours de mai. C'est court. Six : il est évident que les responsables de Cerpolex attendront le plus tard possible - donc fin avril début mai suivant le programme de leur clientèle - pour aller rechercher Alain et Dixie. Ceci afin que ces derniers puissent mettre à profit ces deux dernières semaines d'aventure pour se rapprocher au maximum de Barnéo ou de tout autre point de départ d'un avion ou d'un hélicoptère prêt à aller les rechercher. Mais où seront Alain et Dixie à cette époque ? A l'allure où ils vont et même s'ils mettent le paquet comme on dit, ne seront-ils quand même pas trop loin de tout aéroport pour qu'une opération de récupération soit aisément organisée ?  Car qu'il s'agisse de l'hélicoptère MI 8 ou d'un petit Antonov (genre Twin Otter), il faut savoir que l'autonomie de carburant de ces appareils, les seuls à pouvoir aller rechercher les deux hommes, n'est en fait que de 1200 km lorsqu'ils sont bourrés à craquer - et il ne faut pas oublier de comptabiliser un aller-retour naturellement. Si le pick up doit se faire au-delà de cette distance, il faudrait alors mettre sur pied une opération d'un tout autre genre, avec établissement de camps intermédiaires, dépôts de carburant sur la glace et naturellement risques de voir les fûts disparaître avalés par une faille soudaine ou de ne plus pouvoir atterrir pour refueler là où ils ont été déposés vu la configuration particulièrement changeante - et changeante au jour le jour - de la glace Arctique cette année.
Bref, pour l'expédition Compaq Pole II, les sueurs froides sont loin d'être terminées…

Dimanche 14 avril (day 49) : Malades toute la nuit, les ennuis ne sont pas finis...

Même si nous entendons leurs voix presque chaque jour via le satellite (Iridium), même si nous recevons régulièrement des e-mails via l'iPaq, il est difficile de s'imaginer vraiment ce que ce deux sportifs d'exception sont en train de vivre.
Hier, nous avons appris que, contre vents et marées, ils continuaient d'avancer (la communication fut courte) ; aujourd'hui, on a pu recevoir avec plus amples détails les dernières nouvelles de la banquise. Alain et Dixie sont toujours malades ; Alain a un ulcère à l'estomac et la plaie le fait terriblement souffrir - surtout lorsqu'il tire le traîneau. Dixie, lui n'a pas dormi et a vomi presque toute la nuit - une grosse indigestion. "Il me semble que c'est une erreur de ma part, a confié Alain, car pour gagner quelques milligrammes, toujours la chasse au poids, j'ai augmenté légèrement la teneur en graisse de nos aliments journaliers lors de leur préparation avec Arnaud Tortel. Je pense que ce sont ces petits grammes de rien du tout qui ont fait la différence ces derniers jours. J'ai sans doute eu tort..." Il faut ajouter à ce petit bilan de santé, des pieds (Alain) qui sont couverts de peaux qui se desquament (l'humidité toujours dans les chaussures) et un genoux (Dixie) qui ne tourne pas très bien non plus.

 

Cet écritoire en main, le tableau des incroyables distances qu'il reste à couvrir (ce dimanche soir, il se trouvent encore à 1178 km du pôle) sous les yeux et, surtout, les revers incessants en tête qui jalonnent depuis 50 jours la route de leur aventure (cela a commencé avec les huit jours de retard au départ), on pourrait s'attendre à ce que les deux lascars faiblissent, aient un coup au mental, prennent d'avantage de repos et décident que la comédie a assez duré...
Eh bien non : 24 heures de repos ont suffi et, malgré les maux qui les tarabiscotent, ils ont décidé de reprendre le collier du quotidien et d'abattre le plus de besogne possible. Marcher, toujours marcher, tirer les traîneaux et ne plus penser à rien - la Zen Attitude. Avant d'envisager l'issue la plus favorable à leur aventure. Car bien entendu - nous sommes déjà à la mi-avril - l'heure des décisions doit bientôt sonner.
C'est ainsi que, hier, malgré un vent du Nord qui a soufflé de face pendant leurs 7 heures de progression, faisant encore tomber les températures déjà plus que frisquettes (-38° C le soir), ils ont abattu 6 km et, aujourd'hui, pareil ; 12 kilomètres en deux jours. Et cela, en sachant que, si le vent avait été sud ou sud-est comme il l'est habituellement en cette contrée de la banquise et en cette saison de l'année, il auraient pu progresser de plus de 30 ou de 40 km - la glace devenant, comme ont indiqué les cartes des chercheurs Russes et les pressentiments issus de l'observation du terrain, définitivement plus plat...
Ce sont dans ces conditions que Compaq Pole II continue...

Vendredi 12 avril (day 47) : Les deux Belges se réfugient dans la Zen Attitude...

Un très court email envoyé par l'iPaq (Compaq) ce midi, donnant la position du jour, suivi d'une communciation satellite disant qu'ils sont bel et bien repartis dans l'enfer de cette banquise et qu'Alain va mieux (plus de mal au ventre) mais qu'ils ne comprennent plus rien.
Une dérive qui les a fait reculer de 4 km au moins aujourd'hui (8 km au compteur, alors qu'ils avaient estimé en avoir fait au moins 12 km), un vent du nord qui les a empêché de sortir leurs voiles alors que, cette fois, le terrain n'a jamais aussi plat et dégagé depuis le début de l'expédition. Le froid qui sort ses griffes, - 38° C ce soir (il y a 7 heures de décalage (+) entre Bruxelles et l'expédition), alors qu'on est déjà mi avril, la dérive qui va dans tous les sens, une fois vers le nord, une fois vers l'ouest, une fois vers le sud... "Mais qu'est ce qu'on venu foutre ici ? criait Dixie au téléphone... C'est dingue, tout est contre nous... Voilà trois jours qu'on aurait pu utiliser les voiles car le terrain est défititivement meilleur, s'il n'y avait eu cette merde de vent du Nord. On ne pense plus à rien, nous n'avons plus qu'un choix, nous réfugier dans la Zen Attitude..."

Une lueur d'espoir cependant : l'amélioration des glaces que nous avons noté sur les cartes envoyées par nos amis russes (voir notre nouvelle carte close up) se confirme sur le terrain. Elle est bel et bien effective. Alors, le miracle que tous attendent, c'est pour demain ?

Mercredi 10 avril (day 45) : Non, ils n'abandonnent pas ...

Contrairement à ce qui a été annoncé dans une certaine presse, en Belgique, Alain et Dixie sont loin d'abandonner... Certes, ils ont dû redéfinir les objectifs de leur expédition et resteront de toutes façons sur la déception de la défaite de ne pas avoir réussi la traversée en autonomie comme prévu.
Mais annoncer un abandon alors que les deux hommes en bavent depuis 45 jours, qu'ils vont tout faire pour épuiser leurs 100 jours de nourriture et tenter d'atteindre le pôle Nord, qu'ils marchent 8 heures par jour comme des forcenés et qu'aujourd'hui, par exemple, au lieu de prendre un jour de repos à cause d'une solide crève attrapée hier par Alain, ils ont décidé de continuer à marcher et faire le travail de tous les jours, c'est vraiment ne rien comprendre à ce qu'est la grande aventure...

Les deux forcats de la banquise continuent donc. Journée après journée, pas après pas, difficulté après difficulté. L'idée d'appeler au secours et de se faire récupérer par l'infratructure de Cerpolex ne leur effleure même pas l'esprit.
Cette éventualité est d'autant moins d'actualité que, d'après ce qu'ils nous ont dit à propos de leur journée d'aujourd'hui et en comparant leurs informations avec celles qui nous parviennent de St Petersbourg à propos de la configuration du terrain (voir notre nouvelle carte, cliquer ci-dessous), ils ont devant eux quelques dizaines de km de glaces plates et fort peu de zones de compression. "Si javais été en forme, a expliqué Alain, pendant les six heures de progression du jour, on aurait vraiment pu faire toute cette distance à la voile, tant le terrain était propice. Mais, avec ma crève, il en fallait pas risquer, notre chemin est encore long..."

Un peu d'optimisme donc, températures froides à nouveau (- 30° C), inconfort dans le sac de couchage d'Alain (cette nuit, il sentait des plaques de glace fondre sur ses cuisses !), 6 heures de marche, recul de 1,5 km (la dérive) pendant la nuit, beau temps, merveilleux paysages, Alain a les ganglions gonflés, Dixie est en pleine forme et aide son compagnon...