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semaine
du 18 au 24 mars
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Dimanche 24 mars (day 28) : Pas de communication aujourd'hui.
Samedi 23 mars (day 27) : Dixie tombe à l'eau, Alain va à
la pêche au traîneau...
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Liaison
du 23 mars
(en Néerlandais)
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Malgré
les énormes difficultés rencontrées, à
chaque minute, à chaque heure, on pourrait même dire,
à chaque pas, Alain Hubert et Dixie Dansercoer sont en pleine
forme. Fatigués certes, éreintés même car
ils ne s'attendaient pas à devoir marcher ainsi sur la glace
et affronter un tel enfer, mais en parfaite condition physique.
Et ce n'est pas une chute dans les eaux de l'océan Arctique
qui les amoindrira ; Dixie cherchait un passage devant une eau libre
(il était six heures du soir environ), tâtant de son
bâton la glace ci et là. Soudain le sol s'est fracturé
projetant à l'eau non seulement l'homme mais également
son attelage. Alain avait le choix entre tirer le traîneau (et
Dixie en même temps) ou s'occuper plus immédiatement
de l'homme ; il a naturellement choisi de tirer d'abord son compagnon
hors de l'eau. Lorsqu'il s'est retourné vers le traîneau,
ce dernier était déjà parti à la dérive
sur une petite rivière encombrée d'énormes blocs
de glace. C'est en improvisant une canne à pêche (la
pelle avec un bout de corde fixée à une de ses extrémités)
qu'Alain a pu, après une demi heure d'efforts, ramener le traîneau
vers l'endroit de la chute. Une heure plus tard, les hommes dressaient
le camp...
Ce
samedi 23 mars fut à nouveau un journée très
difficile car le tandem est constamment entouré d'eaux libres
qu'il faut négocier avec les dangers que l'on sait. Lorsque
ce ne sont pas les chenaux qui les freinent, c'est une vieille neige
croûtée (une neige de l'hiver) dans laquelle ils
s'enfoncent à chaque pas jusqu'à la mi mollet et au
travers de laquelle ils doivent tirer le traîneau.
Huit heures de marche (ils allongent peu à peu le temps de
progression, ce qui prouve que le physique n'est pas le moins du monde
atteint), -35° C la nuit et dans la tente, léger vent du
Nord (premier vent du Nord depuis le début de l'expédition),
grosse fatigue, superbes lumières boréales...
Vendredi 22 mars (day 26) : La peur de leur vie...
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Sat
du 22 mars
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A
force de faire l'ours... Zoom derechef sur les ours donc. Cette fois,
ce n'était plus de la rigolade comme on dit. Le 6 mars dernier,
un ours s'était approché à une vingtaine de mètres
du tandem Hubert-Dansercoer.
Aujourd'hui,
la rencontre avec les ours fut plus mouvementée. Ce fut d'abord
un jeune mâle, avec une taille déjà impressionnante,
qui est apparu soudain (il était quatre heures de l'après-midi
environ) au détour d'une ridge (zone de compression où
s'accumulent, comme des morceaux de sucre que l'on aurait empilés
pêle-mêle, des énormes blocs de glace) et qui est
venu examiner de près le traîneau d'Alain. De très
près puisqu'il est venu poser son museau sur la toile rouge.
S'emparant prudemment de son arme, Alain a tiré un premier
coup de feu en l'air, ce qui n'a pas effrayé outre mesure l'animal
; ensuite, comme celui-ci se dirigeait dangereusement vers l'avant
du traîneau, Hubert a tiré un second coup de feu - entre
ses pattes cette fois. Apeuré mais pas trop, l'animal s'en
est allé le plus tranquillement du monde.
Dès
le début de la semaine prochaine, les premières
vidéos de nos expéditions seront sur le
site
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Les
deux hommes n'étaient pourtant pas au bout de leurs peines.
Quelques minutes plus tard, maman ours est venue demander des explications
aux deux hommes. Pourquoi donc faire peur ainsi à son petit
? Plus gaillarde que le rejeton et mesurant plus de deux mètres
de haut, la femelle est venue carrément lécher le traîneau
de Alain ; l'animal se trouvait donc à moins de 3 mètres
de lui.
Il a fallu
à Hubert une sacrée dose de courage et surtout de maîtrise
de soi ("On est quand même pas dans un zoo, ici,
dit-il sur l'audio du jour) pour refaire les mêmes gestes que
lors de la première rencontre du jour et tirer in extremis
entre les pattes de l'animal. Pour le faire fuir, enfin...
Les
autres infos de la journée semblent bien insipides au regard
de ces dangereuses rencontres. Temps mitigé, beau en fin de
journée, nuageux les reste du temps, très mauvaise nuit
pour Alain la nuit passée (il s'est réveillé
trempé dans son sac de couchage, il faisait - 30°C dans
la tente), sacré chaos de glaces à nouveau alors que
les hommes s'attendent à une ouverture prochaine du pack (terrain
plus plat), températures qui descendent à nouveau (-30°
C). L'infernal enfer continue... Depuis 25 jours maintenant,
on peut dire que les deux hommes sont en permanence en situation de
survie...
Pourquoi
faire l'ours (référence à la chute dans l'eau
d'avant hier) ?
Nombreux
ont été ceux parmi nos visiteurs (vous êtes toujours
environ 3 000 à visiter ces pages chaque jour, merci à
tous) qui se sont demandé pourquoi Alain s'est roulé
dans la neige directement après être tombé à
l'eau, avant hier, mercredi 20 mars. " Le geste réflexe,
le geste qui sauve...", avait-il dit.
La réponse nous est venue du Français Arnaud Tortel
que nous avons contacté. Si Arnaud est le diététicien
de l'expédition (pour ceux qui ne l'auraient pas lu, voir
ici notre article sur la diététique polaire), il
est également grand aventurier polaire à ses heures.
En effet, en compagnie de son épouse, il a relié en
effet Resolute Bay au pôle Nord magnétique (un raid de
700 km) en 1999 et, plus récemment, au cours du printemps 2000,
il a traversé (avec Rodolphe André) le pack Arctique
; une chute malencontreuse lors du franchissement d'une zone de compression
(le 6 juin 2000) arrêtant les deux hommes à quelques
200 km du but (voir
ici notre suivi de l'époque / voir
ici un bref CV d'Arnaud Tortel).
C'est donc Arnaud qui a bien voulu nous répondre sur les effets
de ce geste qui sauve, c'est-à-dire se rouler dans la neige
immédiatement après être tombé dans l'eau.
Voici sa réponse :
Comme
l'ours blanc, nous nous roulons dans la neige (ou
plutôt nous nous frottons avec la neige) après
chaque chute à l'eau car celle-ci a le pouvoir de capter
et contenir plusieurs fois son volume en eau. La neige absorbe
comme une éponge l'eau encore liquide, évitant ainsi
d'avoir une épaisse couche de glace sur les vêtements,
une fois le froid entré en action.
Pour l'ours, ce geste est vital car, par grand froid, ces poils
se gèleraient et colleraient entre eux, réduisant
à néant leur protection thermique. Voilà
pourquoi il se roule dans la neige jusqu'à obtenir un poil
sec et soyeux.
Pour nous il en va de même. En sortant de l'eau, si nous
laissons la fine couche d'eau geler à même les vêtements
nous nous retrouverions rapidement dans une carapace de glace.
Ce n'est pas si grave, tant que les tissus (Goretex ou MP+) n'absorbent
et ne retiennent pas l'eau. Par contre, il en est autrement pour
les vêtements polaires par exemple qui se gorgent d'eau.
Sans la neige, on se retrouverait très rapidement avec
une gangue de glace sur le dos, dont il serait impossible de se
défaire.
Par grand froid, la neige avec laquelle nous nous frottons ne
peut pas fondre au contact de l'eau, il fait trop froid. Au contraire
elle devient fortement hydrophile et capte les molécules
d'eau : Vive la neige ! |
Jeudi 21 mars (day 25) : Pas de liaison avec l'expédition aujourd'hui.
Mercredi 20 mars (day 24) : Un homme à la mer !
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Sat
du 20 mars
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Ce
ne sont certes pas des situations courantes ni agréables mais
ils les gèrent comme des pros : pour la première fois
depuis le départ, un homme est tombé à la mer.
A deux reprises aujourd'hui, Hubert a en effet glissé et s'est
retrouvé à moitié dans l'eau de l'océan
Arctique. La première fois, il a pu reprendre appui sur la
glace et se hisser presque immédiatement sur la banquise. Une
heure plus tard, nouvelle chute : cette fois, Hubert est resté
une dizaine de secondes immergé jusqu'à la poitrine.
Pas question toutefois de paniquer : l'aventurier a déjà
connu pareilles situations lors de son raid vers le pôle Nord
en 1994.
Comme il avait laissé les tirettes de ses poches ouvertes,
l'eau a pu s'infiltrer jusqu'à l'intérieur de son maillot
de corps mais n'a pas eu le temps de pénétrer plus loin.
Il a donc effectué le geste nécessaire : se rouler quelques
minutes dans la neige afin de faire sortir le maximum d'humidité.
Puis le tandem a continué son petit bonhomme de chemin.
Autre
fait marquant de la journée : la rencontre avec un couple de
morses qui étaient en train de s'apparier au milieu d'un petit
lac. "Ce sont des bêtes vraiment énormes,
a déclaré Alain. C'était extraordinaire
de pouvoir observer ainsi de tels animaux en plein océan Arctique.
Mais qu'est ce que ça sent mauvais. Incroyable..."
Petite
journée aujourd'hui avec seulement une marche de 5 km vers
le nord - ils ont passé près d'une heure à observer
les deux morses - pour 6 heures de progression. Le terrain était
à nouveau bousculé mais d'après les deux hommes,
il se confirme que l'espoir d'arriver bientôt sur du terrain
plus praticable n'est pas vain. Les étendues de glace relativement
plate en effet se multiplient, le terrain est plus dégagé
et les zones de chaos sont moins fréquentes.
Un
autre extrait du carnet de route de Nansen
Nous
reprenons aujourd'hui le suivi de la saga polaire de Fridtjof Nansen
le célèbre explorateur Norvégien. Il y a 107
ans, le polaire a quitté le Fram le 14 mars dernier avec un
compagnon pour tenter de joindre le pôle Nord à pied.
Les deux hommes ont froid (- 40°C), ils doivent abattre un chien
et rencontrent un terrain extrêmement chaotique, ce qui ralentit
leur progression.
Mardi 19 mars (day 23) : Un iceberg en vue...
Très
courte liaison satellite aujourd'hui, les hommes ayant beaucoup "travaillé".
La glace devient effectivement de plus en plus épaisse et compacte.
Le fait qu'ils aient aperçu pour la première fois un
iceberg prouve peut-être qu'ils sont en train de rentrer peu
à peu dans une zone de banquise plus franche. Donc plus stable.
"Que
ceux qui croient qu'on s'est fourré le doigt dans l'oeil en
tentant cette incroyable traversée, nous a lancé
Dixie tout à l'heure un air de défi dans la voix,
qu'ils fassent attention car le jour où la surface deviendra
meilleure, on filera comme le vent. Et tout le monde sera étonné..."
Température,
-24°C, 7 heures de route, glisse légèrement meilleure,
grosse fatigue le soir, petite réparation des voiles, 1,5m
de glace sous la tente. Très bonne dérive aujourd'hui.
Deux heures de voile ce matin.
Nous
informons nos visiteurs que dès à présent, la
rubrique du suivi des autres expéditions arctiques de ce printemps
2002, est, comme annoncé hier, mise à jour (cliquer
sur le bouton).
Visitant les pages des 11 autres expéditions (ou plutôt
celles des 5 expéditions qui sont déjà sur le
terrain), l'on se rendra compte que, d'une manière générale,
et s'il fallait tirer un élément d'analyse en ce premier
mois d'expéditions polaires dans l'Arctique, il faudrait épingler
deux observations majeures : d'abord l'état fracassé
de la banquise et, ensuite - un corollaire -, l'omniprésence
des eaux libres, ces deux phénomènes ayant été
observés aussi bien du côté d'Artichewski que
des îles de la Nouvelle Sibérie ou de Ward Hunt, Canada
- beaucoup plus nombreuses cette année, s'il faut en croire
ceux qui fréquentent ces coins reculés du globe à
chaque printemps. Un autre signe du réchauffement climatique
?
Demain,
nous publierons un second extrait
de l'aventure de Fridtjof Nansen.
Lundi 18 mars (day 22) : Alain et Dixie passent à l'attaque
!
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Sat
du 18 mars
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Ras-le-bol
de cette lenteur, nos deux aventuriers passent à la vitesse
supérieure. Profitant d'un terrrain plus accessible et plus
plat mais lézardé de dangereux petits fleuves d'eaux
libres, Alain et Dixie ont chaussé la voile des grands jours
- la 21m², celle qu'ils maîtrisent le mieux - et, grâce
à un vent du sud de 10 à 15km/h, ils ont glissé
sur la banquise pendant 4 heures et 30 minutes.
Bilan : une douzaine de kilomètres accomplis. Si l'on ajoute
cette distance à celle faite pendant deux autres heures et
demi de marche et aux kilomètres de la dérive, cela
donne une progression de 14,6 km aujourd'hui.
Bon résultat. Mais grosse prise de risque aussi. "Il
faut qu'on avance, a expliqué Alain au téléphone,
on a donc risqué de prendre la 21m². Mais ce n'était
pas facile car, si la glace était plus plate, notre route était
parsemée de petits fleuves d'un mètre de large environ
; avec la vitesse de la voile, on sautait par-dessus. Tu vois le tableau,
Michel, avec le traîneau derrière qui suit tant bien
que mal - mais qui est aussi 20 kilos plus léger puisqu'on
perd environ 1 kilo chaque jour -, on fait un jump, hop, pour passer
les eaux libres : c'est très grisant et en même temps
un peu fou, non ? Mais on en a assez d'avancer comme des escargots.
Il faut rouler, rouler..."
Temps pourri ce soir, grosse fatigue, nouvelles traces d'ours pendant
la journée, un peu d'eau dans les sacs de couchage, - 32°
C, 7 heures de progression. Très bon moral.
Zoom
sur les autres expéditions
Comme annoncé
il y a quelques jours, voici, pour ceux que l'aventure polaire passionne,
quelques nouvelles des autres expéditions qui s'attaquent à
la banquise en ce printemps 2002.
Il faut souligner tout d'abord le fait que cette saison "Printemps
2002" est exceptionnelle car pas moins de 11 expéditions
professionnelles vont se croiser au pôle Nord dans quelques
semaines. Certes, toutes ne sont pas parties mais il est temps déjà
de parler de deux expéditions australiennes, de l'aventure
d'un Chinois qui est arrivé au le lieu du départ sans
bâtons de ski et qui a dû se faire prêter un sac
de couchage, le sien étant trop vieux, d'un Sud-Africain (Mike
Horn) résident en Suisse qui tente le faire le tour du cercle
polaire arctique comme il a fait le tour de l'équateur il y
a quelques années et enfin de trois femmes qui tentent le trajet
Ward Hunt Pôle Nord.
Pour ce faire deux possiblités pour nos visiteurs, soit cliquer
sur le bouton En bref, soit visiter nos pages "autres expéditions",
plus complètes naturellement.
Nous
profitons de ce zoom sur les autres expéditions polaires
pour annoncer à nos visiteurs que le célèbre
explorateur français Jean-Louis Etienne (qui fait partie
des expéditions de ce printemps) a accepté une
interview de antarctica.org. Nous serons en ligne
avec lui le mercredi 27 mars à 17 heures et publierons
donc - en document audio - cet interview le lendemain matin,
jeudi 28 mars.
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Pour
voir les jours précédents, cliquer sur la semaine correspondante
dans le menu "Dispatches"