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semaine
du 11 au 17 mars
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Dimanche 17 mars (day 21) : vers une amélioration défitive
du terrain ? Peut-être...
Dimanche,
11am, téléphone satellite : aujourd'hui, bonnes
nouvelles : d'une part, le terrain chaotique des jours précedents
semble moins effroyable - les hommes ayant profité d'une petite
neige de la nuit pour enfin glisser pendant quelques heures ce matin
-, de l'autre, un nouvel essai de voile (la 21m²) les a propulsés
en avant de 5 km en moins de 50 minutes.
Depuis
leur départ le 25 février, Alain et Dixie ont parcouru
en tout 180 km mais n'ont fait que 168 km effectifs vers le Nord.
Temps pourri ce soir, pas de visibilité, 7 heures de route,
-30°C, quelques traces d'une maman ours avec deux petits, bon
moral...
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Sat
du 16 mars (2e)
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Quelques
réflexions sur la vanité de l'aventure...
La liaison satellite
hier étant excellente, Alain en a profité pour s'épancher
un peu et livrer ex abrupto quelques réflexions sur
les raisons qui l'ont poussé à entreprendre une telle
aventure - la vanité d'une telle entreprise.
Comme il venait d'apprendre que plusieurs autres expéditions
(partant du cap Arktichewski et tentant de ralier le pôle Nord,
nous en parlerons dans un jours ou deux) n'avaient pas hésité
à se faire déposer au-delà des zones d'eaux libres,
gagnant ainsi plusieurs jours, des kilomètres et épargnant
aussi leurs forces, il s'est posé quelques questions.
Ecoutez la deuxième partie de la liaison d'hier. Emouvant...
Samedi 16 mars (day 20) : Un compagnon inattendu...
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Liaison
sat du 16 mars
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Excellente
liaison satellite (Iridum) aujourd'hui, ce qui nous a permis de faire
connaissance avec le nouveau compagnon de voyage de Dixie et d'Alain
; un énorme et superbe morse.
L'animal est venu casser avec ses défenses la glace sur laquelle
ils venaient de passer (l'anecdote a eu lieu il y a à peine
quelques heures, c'est dire si nous suivons de près nos deux
aventuriers). Puis le monstre a décidé de venir se reposer
à une trentaine de mètres de la tente, plantée
ce soir sur une plaque de glaces jeunes, où il a pris un malin
plaisir à casser la glace à nouveau. Froides frayeurs...
Espérons que le mammifère polaire ne s'approche pas
trop près et ne vienne pas déranger les marcheurs pendant
leur sommeil..
Nous écrivons "les marcheurs" à juste titre
: car, mis à part quelques moments de bonne glisse (rares),
les deux hommes progressent toujours à pied. Toujours le chaos,
toujours une glace aussi boursouflée et aussi mauvaise pour
la glisse. Toujours les souffrances et les muscles soumis à
très rude épreuve. Toujours la même incompréhension
de la part d'Alain qui ne cesse de s'étonner de l'état
de la banquise. "Nous avons atteint les hauts fonds, a-t-il
expliqué, il y a une heure, donc il me semble que la
glace devrait être meilleure. Mais maintenant, je crains les
grandes marées d'équinoxe. On ne sait pas où
l'on va. C'est terriblement, terriblement dur..."
Ceci
a déjà été dit mais...
Plusieurs visiteurs nous ont écrit pour dire qu'il
était dommage que nous ne publiions pas chaque
jour les distances parcourues par l'expédition.
Que ceux-là se donnent la peine de cliquer sur
le bouton 'Progression Data' (colonne des menus à
gauche de la page) et ils se rendront compte que nous
n'avons rien oublié du tout...
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Hier,
Dixie et Alain n'ont marché que 4 heures, contre 7 aujourd'hui
; comme le temps était beau, ils en ont profité pour
faire quelques réparations - la tirette du sac de couchage
d'Alain (recouse avec du fil de pêche), quelques trous dans
la toile des traîneaux - et farter les patins des traîneaux,
ce qui n'a servi à rien.
Il n'empêche : le moral reste au beau fixe et, comme la saison
avance, les deux hommes devraient pouvoir commencer à se servir
de leur ordinateur de poche (iPaq) pour envoyer des messages écrits.
Dans quelques jours aussi peut-être, les premières photos
en provenance de la banquise.
Température
à nouveau plus froide ce soir, -30°C, 18,6 km faits en
deux jours, chaos toujours aussi indescriptible, moins d'eaux libres,
petits lacs ou petites rivières à la place, réflexions
de Hubert sur la vanité humaine (que nous publierons en audio
demain). Étonnant...
Vendredi 15 mars (day 19) : Pas de liaison satellite aujourd'hui
L'avis
du Dr Jacques Richon
sur les doigts gelés d'Alain Hubert
Jeudi 14 mars (day 18) : Bis repetita...
Une
très courte vacation satellite aujourd'hui ; d'une part, les
liaisons sont mauvaises et, de l'autre, les deux marcheurs souffrent
car rien n'a changé depuis hier. Le terrain est digne du plus
infernal des chaos, a juste eu le temps de commenter Dixie.
Dans ces circonstances, on comprend qu'ils n'aient pas grande envie
de se confier. Le dos et les genoux souffrent ; les articulations
aussi. Ils ont mal partout. De tels efforts sont générateurs
de pudeur. Silence...
PS
: le docteur Jacques Richon à qui Hubert avait téléphoné
la semaine dernière pour ses doigts et que nous avions
contacté vient de nous répondre. Demain, nous publierons
son diagnostic. |
Comme
Nansen, ils marchent à deux vers le pôle, comme Nansen,
ils ont emporté avec eux cent jours de nourriture, comme Nansen,
la femme d'un des deux hommes attend un heureux événement
alors que son époux est sur la banquise...
Il y a exactement 107 ans, jour pour jour, que débutait un
des grands épisodes de la saga Arctique. L'explorateur
norvégien Fridtjof Nansen, qui voulait vérifier la théorie
de la dérive de la banquise, a construit un bateau pour affronter
l'enfer des glaces arctiques, ce fut le célèbre Fram.
Le 24 juin 1893, c'est le grand départ vers l'est Sibérien.
Le 25 septembre, voilà le voilier à son tour enserré
dans la banquise. 17 mois plus tard, celui qui fut le conservateur
du musée d'Histoire naturelle de Bergen décide de partir
avec un compagnon vers le pôle.(Voir
aussi nos pages consacrées à l'histoire de l'exploration
dans Arctique)
Mercredi 13 mars (day 17) : L'Arctique les a baptisés...
Mercredi
13 mars 3 pm. Tous les aventuriers ou explorateurs dignes
de ce nom sont unanimes sur ce point : lorsque l'on s'embarque dans
une telle aventure et, surtout, sur un terrain aussi difficile, il
arrive toujours un moment - généralement en début
d'expédition - où les acteurs passent un cap. Cette
frontière est en général déterminée
par un quelconque climax. Pour les uns, ce sera l'adaptation au climat
qui aura mis quelques jours à se faire, pour les autres, ce
sera peut-être une zone géographique franchie ou une
difficulté particulière dépassée. Pour
d'autres encore, cela peut être également un palier atteint
au niveau duquel tous les paramètres de l'aventure se conjuguent
dans la plus parfaite des harmonies.
Pour Alain
et Dixie, sans qu'ils n'aient dit quoi que ce soit à ce sujet
au cours de la vacation satellite (Iridium) - ceci n'est donc que
pure interprétation de notre part, mais nous les connaissons
un peu -, nous sommes persuadés qu'aujourd'hui, un cap a été
franchi.
Lors de leur traversée Antarctique, Alain nous écrivait
après avoir accédé au plateau polaire et connu
les blizzards les plus effroyables, après une quinzaine de
jours de progression donc, il sentait que le 6e continent venait de
les accepter en son sein.
Cette fois, c'est un peu pareil. Ils viennent en effet de vivre la
journée la plus dure des 17 premiers jours. Un jour digne des
plus difficiles moments vécus en 1994, lors de son raid vers
le pôle Nord. "J'ai dit à Dixie, a
expliqué Alain il y a deux heures, la voix plutôt abattue,
que cette fois nous sommes rentrés dans le véritable
Arctique".
C'est-à-dire, là où les forces de l'homme flirtent
avec leurs limites, là où commence réellement
le combat - ou le dialogue, c'est selon - entre l'homme et les éléments.
Jusqu'ici, ils ont connu des jours difficiles. Cette fois, ils sont
entrés dans un autre univers. Nous sommes persuadés
que, d'ici quelques jours, Hubert dira, "L'Arctique, mon vieux
Michel, nous a adoptés..."
N'oubliez
pas notre rendez-vous avec l'histoire de Fridtof Nansen demain...
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Quelles
ont été ces difficultés particulières
? La glace et la glisse plus infectes que jamais; les hommes sont
obligés d'avancer quasiment sur la pointe des chaussures et
des crampons tout le temps, en ahanant comme des bêtes de trait
qu'on mettrait au supplice, pour pouvoir imprimer un quelconque mouvement
vers l'avant à leur traîneau. Sans quoi, rien ne bouge.
L'engin reste scotché sur place. Lorsqu'une mini cadence est
enfin trouvée, voire amorcée, ils rencontrent soit une
fracture qui les ralentit soit un monticule de glace qui les oblige
à se mouler dans d'autres mouvements, perdant ainsi le bénéfice
de la gestuelle mise en place pour avancer de quelque pas les minutes
précédentes...
Voilà ; toute leur journée s'est déroulée
selon cet inconfortable schéma. Les hommes ne voient pas la
fin de l'enfer. On ne peut pas dire qu'ils soient démoralisés
ni découragés. Loin de là. Mais ils ont devant
eux une question à laquelle personne ne peut répondre,
une question lancinante : pour combien de temps encore ce pain noir
sur cette glace blanche ?
Mardi 12 mars (day 16) : Les efforts sont inhumains mais ils avancent...
IL
ETAIT UNE FOIS SUR LA BANQUISE
Une ou deux fois par semaine et parallèlement aux suivis
quotidiens, nous publierons, une évocation historique
concernant la grande saga polaire Arctique.
Pour
ce faire, nous avons choisi des épisodes de l'aventure
vécue à la fin du siècle dernier par le
célèbre explorateur norvégien Fridtjof
Nansen, le premier homme à s'intéresser vraiment
à la dérive de la banquise Arctique.
Ce dernier quitta son bateau, le FRAM, qu'il pensait bloqué
par la banquise, le 14 mars 1895 et s'en alla seul avec un compagnon
à la conquête du pôle Nord.
le premier épisode de cette mini saga sera publié
le jeudi 14 mars : Un déchirant départ
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Ce
soir, les deux hommes dorment sur une plaque de glace de la grandeur
d'un terrain de basket. Avec des monticules de glaces brisées
tout autour et, une fois n'est pas coutume, pas la moindre trace d'ours
aux alentours.
A propos d'ours, nous avons appris par les gens de Cerpolex (la logistique)
ce matin qu'il existe une île minuscule située à
quelques encablures du cap Arnisiy (d'où les hommes sont partis)
qui est connue pour être une véritable réserve
d'ours blancs... Pas étonnant dès lors qu'il en aient
rencontré tant les premiers jours...
Ce soir, Alain et Dixie sont extrêmement contents de la journée
accomplie car, malgré les difficultés de la glace et
une glisse toujours exécrable, ils ont progressé de
14,3km en comptant une dérive de 3,3 km. Ce qui veut signifie
11 km à la seule force des hanches, du bassin et des bras.
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Liaison
du 12 mars
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Un
autre signe encourageant c'est le fait que, pour la deuxième
journée consécutive, ils n'ont pas dû traverser
de chenaux d'eaux libres ; même si les glaces, là où
ils se trouvent, restent encore jeunes et fragiles, il semble que
la banquise soit désormais moins disloquée et que donc,
dans quelques jours, ils devraient évoluer sur un terrain plus
plat.
La
température reste "clémente", - 20° C,
le matériel est OK, le moral au zénith, les forces inébranlables,
138,6 km accomplis depuis le départ, moyenne journalière
environ 9,5 km...
Lundi 11 mars (day 15) : Premier jour sans eaux libres mais pas sans
chaos...
Lundi
2 pm "On
ne peut pas se faire un idée, explique Dixie au téléphone,
certes, nous n'avons plus d'eaux libres depuis ce matin mais nous
sommes face à un indescriptible chaos de glaces qu'il faut
négocier avec des traîneaux qui semblent peser une tonne...
Difficile..."
CE
QUE LES HOMMES MANGENT
ET POURQUOI
Comme
prévu, nous publions ce lundi un intéressant
dossier sur l'alimentation polaire qui peut également
servir à tous ceux qui fréquentent, une
fois ou l'autre dans leur vie, les régions froides
de notre globe / les calories, l'avantage des graisses,
les différents aliments, les rations journalières,
bref, ce que les deux hommes mangent et pourquoi
cliquez
ici
Il a été rédigé par le
diététicien de l'expédition, le Dromois
Arnaud Tortel
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Partis
à 10 am, Alain et Dixie ont marché pendant 6h30 aujourd'hui.
Pas question de sortir les skis. En-dessous de la neige recouvrant
les glaces (il a neigé la semaine dernière), se glissent
des eaux de mer qui empêchent toute glisse. Une véritable
boue blanche... Qui épuise les forces des aventuriers.
"Nous ne pouvons pas faire vraiment plus que ce que nous
faisons, explique Alain comme pour se justifier, le soir, nous
sommes crevés et puis, de toute façon, on ne peut pas
avancer plus vite sous peine de prendre trop de risques. Demain, à
première vue, le terrain ne sera pas meilleur... Il faut attendre,
on a la forme, mais cette première partie d'expédition
est épuisante. Cela dit, on filme pas mal car les lumières
sont toujours aussi extraordinaires que durant les premiers jours
et l'on prend pas mal de photos. Impossible encore d'en envoyer car
on a quelques problèmes avec les batteries. Dixie est aux petits
soins pour moi, il soigne mes doigts, et, le matin, il fume sa petite
pipe avant de commencer la journée et cela sent bon.... Le
moral est excellent. On attend que viennent des jours meilleurs..."
Départ
à 10 am, presque 7 heures de marche, température plus
clémente : -20° C...
Lundi
10 am / Comme il a été question ce week
end d'une panne éventuelle de batteries, il est peut-être
utile de profiter de cette occasion pour expliquer comment fonctionne
l'utilisation de l'énergie dans une telle expédition.
Mis
à part le fuel pour le réchaud, la seule énergie
utilisée par les deux hommes est l'énergie solaire ;
ils ont emporté deux panneaux solaires, 100/40cm et 32 watt,
qui sont équipés de régulateurs spécifiques
pour optimiser la charge.
Pour charger ces panneaux solaires, il faut six heures au minimum
dans des conditions optimales, c'est-à-dire à l'arrêt
et les rayons perpendiculaires au plan des cellules. Mais les hommes
n'auront pas toujours le temps de les faire charger à l'arrêt
; ils ont choisi d'arrimer alors les panneaux sur le dessus des traîneaux
et de les faire charger pendant la progression. Pour cela, il faut
que le terrain ne soit pas trop chaotique.
Ces
deux panneaux solaires alimentent une batterie principale (12V,12amp/h,
4kg) qui fonctionne selon le principe d'une batterie de voiture. Cette
batterie (15/12cm) a été disposée dans un petit
caisson en aluminium, lui-même équipé de toutes
les sorties et branchements nécessaires. Les hommes n'ont donc
plus qu'à introduire les fiches dans ce caisson et ne sont
pas obligés d'accéder directement à la batterie
(gain de manipulations).
Cette batterie charge les appareils suivants : le téléphone
satellite Iridium (photo ci-contre), l'ordinateur Compaq iPaq (photo
à droite) et l'ordinateur portable du même fabriquant.
Le type de branchement choisi a été celui de l'allume-cigare.
Grâce à des petits régulateurs de 8,4V, un système
d'alimentation spécial a été conçu au
départ de cette batterie principale pour alimenter les batteries
des cameras ainsi que celles des appareils de photo. Hubert a choisi
d'emporter 4 batteries chaque fois : 4 pour l'Iridium (donc ils ne
pouvaient pas être en panne de batterie ce week end car une
seule batterie seulement a été utilisée jusqu'ici),
4 pour les caméras et 4 pour le GPS (qui, lui, fonctionne sur
ses batteries au lithium propres).
En matière de câblage, tous les câbles ont été
remplacés (lorsque cela était possible) par des câbles
résistant à des températures extrêmement
basses, sans quoi les câbles d'origine auraient vite cassé.
Pour
voir les jours précédents, cliquer sur la semaine correspondante
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